La résidence des Linandes Mauves érigée pour le Crous en 1965, comprend dix bâtiments organisés autour d’une cour plantée connectée à un foyer déployant de généreux espaces communs. La réhabilitation réalisée de la tranche précédente, fut particulièrement complexe notamment à cause de l'état de la structure existante et de la présence d'amiante sur l’ensemble des enduits. Aussi, le programme de cette nouvelle opération privilégiait la démolition des quatre bâtiments restants, dans le but de créer des nouvelles constructions plus adaptées aux exigences contemporaines. Notre proposition, à contre-pied de la demande de départ, s'est basée sur une stratégie de transformation en profondeur des quatre édifices existants présentant des qualités architecturales et de l’ajout d’un bâtiment supplémentaire pour compléter avantageusement le programme.


La conception générale a été dirigée par trois axes majeurs : - réinterroger la résidence étudiante à l'échelle urbaine à travers l'apposition d'une nouvelle peau extérieure unifiant l’existant et l’extension ajoutée en prolongation d'un pignon affirmant sa présence sur le boulevard. - s'intéresser aux potentialités d'usage des logements en considérant les spécificités de leurs morphologies existantes complexes développant des dispositifs architecturaux diversifiés : demi-niveaux, système complexe de loggia, balcons, accès - révéler les conditions constructives des bâtiments existants comme une variable économique et esthétique.
L’opération de réhabilitation se démarque de l’ensemble résidentiel, précédemment réhabilité via une isolation par l'extérieur classique en enduit clair, par l’apport d’une nouvelle matérialité visant à requalifier ce patrimoine sans pour autant le dénaturer. Ce travail de revalorisation thermique est couplé à un re-cloisonnement des chambres pour réhausser la qualité de vie à l’échelle du logement. La réhabilitation lourde des espaces communs et administratifs, ainsi que la reconfiguration des services extérieurs achèvent d'améliorer l’accueil des étudiants à l’échelle du site de la résidence. L’intervention globale, qui fut réalisée en site occupé, offre alors un nouveau visage à l’ensemble du quartier par sa position en proue sur le boulevard de la Viosne.


La réponse architecturale joue sur la simplicité apparente du traitement monochromatique des surfaces pour révéler peu à peu des jeux subtils de reflets et de transparences qui multiplient les effets visuels au sein de la parcelle. La totalité des bâtiments sont vêtus d’un bardage métallique en acier plié offrant systématiquement deux angles de réflexion aux rayons du soleil. Ce qui s’ajoute à l’éclat des cages d’escalier en béton lasuré se détachant de la façade et projetant leurs ombres sur cette surface dentelée. En attique, le bardage se perfore pour offrir une transition entre la masse bâtie et le ciel de la ville nouvelle de Cergy. Cette maille qui ferme le volume sans couper la vue se déploie aussi sur les angles rentrants de l’ancienne architecture qui retrouve une unité compositionnelle permettant ainsi aux espaces extérieurs de se révéler en coeur d’ilot face à ces fonds de scène retrouvés.


Le projet de réhabilitation amène alors la question du rapport ténu entre la façade et le volume à l’aune des exigences énergétiques actuelles qui nécessitent parfois une conception séparée de ces deux sujets architecturaux. Le drapé de la tôle ondulée vient recouvrir uniformément les volumes autrefois complexes des immeubles, se prolongeant en toiture de façon diaphane, afin de rattraper les décrochés dus à l’organisation en demi-niveaux des planchers intérieurs existants. Pour autant cette véracité organisationnelle se donne à lire de manière limpide sur les pignons où les décalages de niveaux s’illustrent matériellement à la jointure des deux faces de l’enveloppe.


L’organisation composite des 144 logements qui crée la richesse du plan intérieur peut alors se développer librement sans entrer en conflit avec la rationalité de la façade qui s’adresse désormais à l’échelle de l’ensemble urbain et dépasse le module du studio unitaire. La multiplicité des situations en façade dans la structure existante (loggias, balcons et décrochés) est ainsi rattrapée par cette nouvelle peau unifiante et isolante. Cependant, le jeu des volumes précédents est laissé à deviner pour l’observateur par le dessin des baies qui, tout en créant une logique structurante à l’échelle de l’ensemble construit, permet de saisir ponctuellement les irrégularités de la composition passée.


Le projet fait le pari de concevoir l’intervention sur l’existant depuis l’extérieur comme depuis l’intérieur de façon simultanée et complémentaire, sans tomber dans le compromis. La rationalité de l’intervention dictée par des contraintes économiques et d’efficacité de tenue de chantier n’impose ainsi aucune réduction des possibilités d’aménagements internes mais permet au contraire d’unifier des situations disparates héritées d’un plan existant hétérogène.
Si l’intervention à l’échelle urbaine vise à simplifier les volumes afin d’apaiser le rapport des étudiants à leur lieu de vie, le travail sur l’intérieur des édifices existants veut, au contraire, mettre en scène la complexité d’imbrication des systèmes constructifs et d’aménagement hérités. En remettant à nu la structure béton du foyer (espace de vie) ou en laissant apparents les parpaings cloisonnant les pièces partagées, l’architecture intérieure célèbre la matérialité ordinaire de l’édifice tout en créant des jeux de contraste et de camaïeu de teinte entre toutes ces surfaces plus ou moins rugueuses à l’oeil. Ce nuancier de gris et de textures offre alors aux cloisons et doublages blancs un éclat et une luminosité particulièrement saisissants, faisant du traitement le plus basique et le plus répandu dans la réhabilitation un évènement dans le parcours architectural intérieur.


Depuis l'extérieur, le gris clair de l'ensemble permet à la végétation de prendre une place de choix en cadrant ainsi des situations paysagères ou urbaines variées. En intérieur, sur cette toile de fond qui refuse de s’effacer à la vue, de multiples objets se détachent par leur forme ou leur colorimétrie. Les escaliers en métal connectant les demi-niveaux sont remis en peinture pour retrouver leur teinte bleue éclatante d’origine. Ces accents de couleur se déclinent aussi dans la signalétique et sur le mobilier intérieur des chambres, pensé autour de cette couleur et de ses teintes complémentaires. Dans les espaces communs, d’autres formes géométriques pures se déploient telles que les cylindres chromés des gaines de ventilation ou les pavés allongés de béton blanc servant de bancs.

Équipe:
Crous de l'Académie de Versailles
Graal : architecte, OPC, synthèse, mobilier, signalétique
I+A laboratoire des structures : structure
Solab : fluides /thermique / acoustique / HQE / SSI)
éco+construire : économiste
Samex sécurité : amiante & plomb
Equipe construction die environnement : désamiante et déplombage
Jpv bâtiment:menuiserie intérieure
Brunet : CFO électricité (CFA, SSI)
Giaime Meloni : Photographe

Matériaux utilisés :
Domatech : gros oeuvre, vrd
Plastalu : menuiserie extérieure, ferronnerie
Plébac : façade, isolation extérieure, étanchéité
Euro-ascenseurs : ascenseur
Sen carrelage : revêtements de sol et muraux
Les peintures parisiennes : peinture
Bsmg : chauffage, ventilation, plomberie
Bacf : cloisons, plafonds suspendus, isolation projetée
